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PATAXICO
14 juin 2008

Notre arrivee en Bolivie, Les Jesuites et Le Che

Bonjour a tous,

Ca y est, nous sommes enfin en Bolivie. On attendait ce moment avec impatience.
Et ben oui, jusqu'a present, exceptes les 15 derniers jours dans le grand nord argentin et la parenthese "Ile de Paques", nous ne pouvons pas dire que nous avons pris, comme dirait Christelle avec beaucoup de poesie, "une grande claque dans la gueule". En effet, le sud du continent, mine de rien, ressemble beaucoup a l'Europe. Comme les indiens se sont tous faits massacrer ou decimer par les maladies, les habitants descendent tous directement des europeens. Les paysages ressemblent a ceux d'Europe puissance 10 niveau gigantisme, et les grandes villes (Buenos Aires, Santiago, Valparaiso...) ne different pas enormement de nos grandes villes... L'image que nous avions en tete de l'Amerique du Sud, ce n'est que depuis 15 jours que nous l'avons devant nos yeux et vraiment a bloc depuis l'instant meme ou nous avons fanchi la frontiere entre l'Argentine et la Bolivie.

Premier choc : c'etait le calme plat a Pocitos en Argentine, pas un chat dans la rue, nous faisons  500m de plus et c'est de la folie a Yacuiba en Bolivie. Ca grouille de monde, il y a  des echoppes qui vendent de tout et de n'importe quoi, ca gueule, ca vend de la bouffe dans la moindre petite gargotte posee sur le trottoir, les rues sont degueulasses, il y a des chiens errants et estropies partout et des gamins de 2/3 ans qui se balladent tout seuls et s'amusent a leur balancer des pierres. Il y a des gens qui t'alpaguent pour t'orienter vers un  bureau de change ou te vendre un "Lomito" (hamburger local)... bref ca degueule litteralement de vie dans une sorte de  micro cour des miracles. Comme gueulerait Mouss dans les bureaux de la STD des que le ton monte un peu :  "J'ADORE CETTE AMBIANCE SUD AMERICAINE".

8H00 de bus de plus apres la frontiere et nous voila a Santa-Cruz. Pourquoi Santa-Cruz???
Ceux qui connaissent un peu la Bolivie peuvent effectivement se poser la question... c'est probablement la ville la moins touristique et la moins interessante du pays. Santa-Cruz a pourtant un merite, c'est d'etre le point de depart d'un circuit de plus de 1000km a travers les... "Missions Jesuites". Mais qu'est ce que nous sommes alles foutre dans les missions jesuites??? Christelle a t-elle eu une vision divine!!! Ben, faut etre clair, nous n'avions pas du tout prevu d'y aller au depart, mais comme souvent depuis que nous avons commence notre voyage, il y a certaines rencontres ou certains aleas qui nous font changer de route. Je crois que la, ca a ete le summum : jamais ces changements de programme n'ont fait l'objet d'autant de discussions...
La premiere fois que nous avons entendu parle des missions, c'etait a Ushuaia. Dans le bus qui nous y emmenait, nous rencontrions Jean-Paul, parti du Perou depuis 5 mois. Sans meme un detour par le  Machu Pichu, il avait fait le tour des anciennes missions jesuites localisees de part et d'autre du Paraguay. J'avais trouve ca un peu bizarre de partir en Amerique du Sud pour visiter des missions alors qu'il y a un paquet de monasteres terribles en Europe, et puis au bout de quelques instants de discussion avec lui,  j'ai eu un flash qui m'a rappele un des plus beaux films que j'ai jamais vu: "Mission" de Roland Joffe avec Robert de Niro. Ce film pouvait, c'est certain, susciter l'envie d'y aller mais nous etions encore loin, a l'epoque, d'y penser serieusement.
Viens ensuite l'Ile de Paques et le hurlement de joie de Christelle dans un cafe Internet lorsqu'elle apprend que Nathalie (une copine d'internat) et Ludo (son mari), decident de nous rejoindre en Bolivie pour quelques jours. Le RDV est fixe au 17 juin a Sucre. Tout collait a merveille sauf la date. Ils arrivaient le 17 et nous, nous projetions deja d'y etre au debut du mois. Une dizaine de jours a attendre a la frontiere ; il fallait qu'on trouve un truc a faire et c'est donc la que j'ai repense aux missions.
Le probleme est qu'au fur et a mesure que nous montions vers le nord de l'Argentine, nous en entendions des vertes et des pas mures sur la region de Santa Cruz. La ville et ses alentours sont en pleine effervescence politique. Etant la region la plus riche du pays, des independentistes lancaient, le 4 mai dernier, un affront au president Evo Morales en organisant illegalement un referundum ayant pour objet de ratifier son independance economique et policiere. Marre de payer pour les plus pauvres certainement... Bref,  plus nous montions vers le nord, plus la situation decrite tournait au catastrophique et plus le tein de Christelle tournait au vert a l'idee d'aller dans cette region de la  Bolivie. Perso, je m'en fichais un peu ne comprenant pas quel pouvait etre les risques pour les touristes dans une revolte qui ne les concerne absolument pas... et puis apres tout ce n'etait que des on-dit de personnes qui n'etaient pas allees a Santa Cruz... 
C'est Francois a Tilcara qui  reussit a me convaincre de renoncer, surtout qu'il nous suggera un plan dans la jungle qui avait l'air genial.  Deux jours avant de partir, les missions etaient donc oubliees. Dommage car j'aurais bien aime croiser De Niro en robe de bure... Le probleme du plan de Francois etait qu'il nous faisait traverser toute le Bolivie du sud au nord (jusqu'a Trinidad) pour redecendre ensuite en bateau. Un trip terrible mais qui, pour le coup, risquait serieusement de nous faire louper nos potes a Sucre. Francois nous parla aussi d'une autre region, Samaipata, qui imposait seulement une courte escale a Santa Cruz. Banco donc pour Samaipata, meme si je me voyais mal y rester une dizaine de jours.
Voila ou nous en etions 5 minutes avant de prendre le taxi pour la gare routiere de Salta, nos billets de bus en poche pour Santa Cruz. Les missions etaient aux oubliettes, jusqu'a ce qu'au moment de rendre les clefs de notre chambre a Salta, nous fassions la rencontre d'un francais qui revenait devinez d'ou... je vous le donne dans le mille Emile, des missions jesuites. "Fabuleux, j'y vais regulierement depuis 2002, c'est LE truc a faire en Bolivie, avec bien entendu le salar d'Uyuni. Nous n'avons meme pas eu le temps de nous presenter et de faire plus ample connaissance, le taxi nous attendait, mais autant Christelle que moi en etions convaincus ; nous devions aller voir ces missions...

Nous sommes arrives a Santa Cruz a 5H00 du mat. Tout etait mort... sauf autour de notre bus. L'idee etait de rester le moins longtemps possible dans cette ville qui ne nous disait absolument rien. Une heure a attendre avant l'ouverture de la gare. Deux en fait car je zappe le decalage horaire entre l'Argentine et la Bolivie. Il est donc 4H00 du mat, heure Bolivienne, quand nous arrivons et la gare n'ouvre qu'a 6H00. 6H30 la gare ouvre enfin.  Les horaires ici, c'est l'Afrique... chacun fait comme il veut... D'abord calme, la gare finit vite par s'animer pour litteralement exploser. Ca hurle dans tout les coins... Yacu, Yacu, Yacu, Yacuiba.... Cochaba, Cochaba, Cochaba, Cochabamba..... les vendeurs de tickets de bus, inepuisables s'en donnent a coeur ouvert...  un vrai souk Africain. Au bout de 2 heures, nous avons enfin nos billets pour San Javier, premiere des missions sur notre parcours. Le bus part a 14H00, soit encore 6 bonnes heures d'attente dans cette gare pourrie... largement le temps de poster un colis pour la France (2 bonnes heures quand meme au cours desquelles Christelle s'est fait abordee par une vendeuse de masque pour cheveux qui voulait lui vendre une boite de 1Kg de son produit... apres la laine le masque pour les cheveux... heureusement elle n'a pas craquee).  De nouveau 6 heures de bus et enfin un hotel potable arrive a San Javier, apres plus de 2 jours de voyage depuis Salta...

Les missions..., je ne vais pas les decrire une par une sinon vous en avez encore pour 3H00 de lecture. Notre circuit est passe par San Javier, Concepcion, San Ignacio de Velasco, San Rafael et San Jose de Chiquitos, hauts sites de l'implantion des Jesuites dans l'est Bolivien. Les missions se ressemblent toutes mais sont toutes tres belles. Autant, les eglises de Chiloe nous avaient un peu decues, autant la c'est une autre dimension. Les villes sont construites selon la meme architecture : une place centrale carree verdoyante autour de laquelle des batiments bas bordes d'arcades en bois menant a l'eglise du village. L'histoire des missions jesuites est fascinante. Je regrette un peu de ne pas en savoir plus, mais d'apres ce que nous avons pu comprendre, les Jesuites auraient colonise cet endroit du monde au debut XVIIIeme siecle. Contrairement a beaucoup d'autres endroits, l'evengelisation des indiens Chiquitanos se serait faite relativement pacifiquement. L'apport le plus remarquable des Jesuites est sans aucun doute la musique. "Hoy dia todos nuestros pueblos tienen su organo, una cantidad de violines, violoncelos y contrebajos, hechos todos de madera de cedro; tienen clavicordios, arpas, trompetas etc. , todos de mi fabricacion y he ensenado a los indios a tocarlos"  (A ce jour, tous nos villages possedent leur orgue, une quantite de violons, violoncelles et contrebasses tous fabriques en bois de cedre; ils ont des clavecins des harpes des trompettes etc., tous de ma fabrication et j'ai enseigne leur utilisation aux Indiens) Martin Schmidt, Jesuite suisse missionnaire en 1761. Tant et si bien qu'encore aujourd'hui, les locaux continuent de jouer de la musique dans leur village. Plus gai que les missions : l'ambiance dans les villages. Spectateurs d'un tournoi de football feminin a Concepcion ou de danses improvisees dans un "comedor" de  San Ignacio, les villages bougent pas mal et nous sortent un peu de la torpeur des missions.

Tout le voyage s'est fait en bus et rien que ca, c'est assez epique. Les bus  boliviens vont nous faire regretter le confort argentin et chilien... Heureusement la route est belle. Nous avons traverse entre chaque mission, un melange de savane et de jungle sur des pistes en laterite...l'Afrique on vous dit!!!  Une apparition un peu spe nous est arrive entre San Rafael et San Jose de Chiquitos. Le bus etait blinde de chez blinde. J'etais debout, et Christelle qui venait de s'asseoir laissa sa place a une bolivienne qui tenait son gamin dans les bras. Montent alors deux extra-terrestres qui virent la Bolivienne et son gosse, sous pretexte qu'ils avaient des places assises. Comment decrire ces deux bonhommes... Imaginez Laurel et Hardy en nettement moins sympathiques, deguises en paysans suisses : salopettes noires, chemises a carreaux boutonnees jusqu'au col. Le gros a un chapeau de Cow Boy et le grand maigre une coupe de cheveux que n'aurait pas reniee Adolf Hitler : rasee sur les cotes et avec une grande meche sur le devant.  Ce ne sont pas des Boliviens, ils ont le tein hyper clair voir limite albinos, des yeux bleux pales, des cheveux blonds. Ils parlent un melange d'allemand et d'hollandais, bref une langue barbare. Serieusement si l'epoque collait, on aurait cru deux SS refugies en Amerique du Sud tentant veinement de se camoufler en Charles Hinghals de "La petite maison dans la prairie"...  L'arret suivant : 4 autres bonhommes du meme style montent dans le bus. Nous hallucinons, d'ou sortent ces mecs qui n'ont vraiment pas l'allure de touristes et encore moins de Boliviens... En fait, il existe une grosse colonie de "Mennonites" dans le secteur. Pour info, les "Mennonites" forment une secte qui n'obeit qu'a une seule loi, celle de la Bible. C'etaient au depart des Suisses qui se sont fait expulser au XVIIeme siecle. Le gros des leur troupe vit aujourd'hui aux Etat-Unis, mais il y a une communaute ici et au Paraguay. Bref c'est un peu surprenant de les rencontrer quand tu ne t'y attends pas, ici au fin fond de la Bolivie... Notre tour des missions s'est termine a San Jose. De la nous avons repris un bus pour Santa Cruz puis avons file directement a Samaipata, a mi-chemin entre Santa Cruz et Sucre.

Samaipata a ete une superbe halte de 2 jours. Elle est situee dans le "codo de los Andes",  litteralement : le coude des Andes. Le village est perche a 1700m d'altitude, a la limite entre les Andes et l'Amazonie. Nous y avons fait une ballade dans des formations rocheuses qui m'ont vaguement rappele les images que j'avais pu voir du Drakensberg en Afrique du Sud. Une ballade magnifique entre la montagne et une sorte de debut de jungle, avec un guide a la gueule superbe, un peu ravage par le temps, mais au sourire incroyable et accompagne de 2 israeliennes et une neozelandaise. Le lendemain, une petite visite au Fuerte de Samaipata (ruines pre-colombiennes classees au patrimoine mondial de l'UNESCO) a confirme ma complete insensibilite aux vieilles pierres et nous revoila partis pour un autre haut lieu de l'histoire bolivienne : Villagrande et La Higuera.

Pour y parvenir, nous avons pris a 18H00 le bus de 16H00 (vraiment n'importe quoi les horaires ici) et la encore, ca a ete folklo. Comment dire!? A mi-parcours, le bus s'arrete dans un village paume, le chauffeur sort prenant bien le soin de nous enfermer a bord et il va tranquillement bouffer son repas du soir sous nos yeux. Impossible de sortir pour pisser un coup. Je me suis mis a rigoler en imaginant cette meme scene a Paris : un chauffeur de la ligne 91 arretant son bus sur la bas cote, enfermant ses passagers, allant tranquillement bouffer son Steak Frite en terrasse devant les yeux de ses passagers et revenant 1/2H apres mine de rien... Vive la Bolivie. Bon nous sommes quand meme arrives a Vallegrande sains et saufs.
Pour les nostalgiques des revolutions du XXeme siecle, Vallegrande est le pueblo ou a ete expose le corps du Che, le 09/10/1967, apres son execution  et la Higuera, ou nous sommes alles depuis Vallegrande, est le lieu ou il fut capture, detenu 2 jours puis execute le 08/10/1967 au soir, dans l'ecole du village. Je n'arrive pas a etre objectif en pensant au Che. D'un cote, je me dis que son combat pro-communiste et ses actes revolutionnaires ont cause bien des morts tant a Cuba, qu'en Afrique ou qu'ici en Bolivie, qu'il s'est battu pour des causes perdues ou qui ont amenees a leur tour des dictateurs (Castro a Cuba) et qu'il a ete une sorte de "bourreau fanatique" temoin d'un sacre paquet d'executions. Mais d'un autre cote, je ne peux pas m'empecher de le voir avec son sourire jusqu'aux oreilles comme une sorte de Robin des Bois du XXeme siecle berce d'utopie. Cette image, sans doute un peu fabrique par Castro lui meme, reste malgre tout une belle image qui malheureusement a tendance a nous faire oublier son cote obscur...
Comme c'est le 80eme anniversaire de sa naissance (il est ne le 14/06/1928), je garderai, pour l'heure, cette deuxieme image, qu'il offre au Monde aujourd'hui.
Alors "Feliz Compleanos Comandante" ... 
Hasta la Victoria Siempre

Suerte

Vince

PS1: Tres tres grosses felicitations a Natouille pour son concours, bravo l'Ecole d'Athenes c'est top. On t'attend au Perou...

PS2: Bravo petite soeur pour ton passage en premiere ES... C'est comment l'Eco a Hong-Kong???

PS3: Peut-etre certains lecteurs occasionnels de ce blog ne l'ont pas repere. Vous pouvez vous inscire sur La Newsletter, ce qui vous permettra d'avoir directement sur votre boite mail une info des que nous publions un nouveau message. Ca evite de se connecter regulierement sur Pataxico pour n'y trouver... aucun changement. Pour s'incrire, voir le message de Christelle dans la Categorie "Bons Plans" ou incrivez votre mail dans la case en haut a droite du blog et suivez les instructions.


1 Lea dans l'album photo joint

Ont ete rajoute dans l'album des prenoms : Laetitia (on pense tres fort a toi), Xavier, Sophie, Pierre (on espere trouve mieux) et Cathy


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Commentaires
P
Merci pour ces récits à la fois culturels et sineux du cheminement de la pensée de Vincent qui, par une succession de "flash", nous justifie un itinéraire original. <br /> Et les photos sont toujours suberbes et vivantes surtout qd vous ête dessus.<br /> Ce blog servant de support de comm privé, profitons en pour crier BRAVO NATOUILLE pour ta brillante réussite au concours de chercheur pour Athènes, c'est génial! <br /> Bonne continuation à tous, voyageurs sur la route ou dans la tête.<br /> Bisous.
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B
Toujours aussi décoiffant! Et dire que chaque jour qui passe nous rapproche de votre retour. Dommage! Vos aventures et vos commentaires sont revigorants et sotiraient de la dépression un régiment de suicidaires. Pour un peu, la sécu devrait vous rembourser votre voyage ou au moins vous sponsoriser. Après l'amérique du sud, pourquoi ne pas continuer vers l'asie ou l'australie?<br /> On sera quand même content de vous retrouver mais j'hésite entre le plus tard possible ou le plus tôt pssible! C'est n'est finalement qu'une histoire de verre à moitié plein ou à moitié vide!<br /> Pour l'instant, continuez! <br /> Bisous à tous les deux
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